TVA sur les prestations pro Deo reportée au 1er septembre 2017

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À la suite d’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 28 juillet 2016 (Affaire C 543/14), le SPF Finances a décidé fin décembre 2016 (Décision TVA n° E.T.131.005) qu’à partir du 1er avril 2017, les prestations pro Deo effectuées par les avocats dans le cadre de l’aide juridique de deuxième ligne – jusqu’ici soumises au taux de 0 % à titre d’exception – devaient être soumises au taux normal de TVA de 21 %.

Dans cette décision, il était décidé de soumettre, à partir du 1er avril 2017, les prestations pro Deo effectuées par les avocats dans le cadre de l’aide juridique de deuxième ligne, ainsi que les prestations pro Deo effectuées par les huissiers de justice dans le cadre de l’assistance judiciaire, au taux normal de TVA de 21 %. L’administration a accepté que le taux exceptionnel de zéro pour cent soit appliqué sur les états d’honoraires qui sont établis au plus tard le 31 mars 2017, même si leur paiement n’intervient qu’ultérieurement.

Entre-temps, les deux Ordres des avocats communautaires (OBFG et OVB) ont mené des négociations pour réduire au minimum l’impact de la suppression du taux zéro. Une concertation s’est par conséquent déroulée avec le ministre parce qu’une mise en œuvre dans au délai aussi court n’était pas possible (notamment à cause de l’adaptation du module BJB…).

Un autre problème s’est posé, à savoir sur le taux de TVA applicable aux montants que l’avocat du justiciable perçoit à partir du 1er avril 2017 et sur la façon d’exécuter la décision du SPF Finances en pratique.

À propos des modalités pratiques de la décision précitée, le ministre a posé le 13 mars 2017 dans une communication aux Ordres ce qui suit.

Sur les rémunérations payées en mai/juin 2017, ainsi que sur l’éventuel complément plus tard dans l’année, aucune TVA ne sera prélevée. Le moment de l’imposition tombe en même temps que le délai légal du 1er février (article 2 de l’arrêté royal du 20 décembre 1999 – rémunérations), date à laquelle est fixé dans chaque dossier de manière définitive le nombre de points qui est accordé. Par conséquent tous les dossiers clôturés au cours des contrôles croisés 2015-2016 (payés en 2017) restent soumis au taux d’exception de zéro pour cent. Tous les dossiers clôturés au cours des contrôles croisés subséquents seront soumis au taux de TVA normal de 21 %.

À partir du 1er avril 2017, l’avocat doit considérer les paiements qu’il perçoit directement de ses justiciables comme soumis au taux de TVA normal de 21 %. La TVA est incluse. La TVA due doit être reprise par l’avocat dans sa déclaration de TVA et être reversée à l’administration au moment du paiement du demandeur (sauf si l’avocat a un excédent de TVA déductible ou qu’il entre dans le champ d’application du régime de la franchise des petites entreprises).

Pour les stagiaires et collaborateurs qui recourent au régime spécial (visé par la circulaire 47/2013, n° 164 et suivants), les prestations dans le cadre de l’aide juridique de deuxième ligne seront dorénavant prises en compte pour le calcul du montant qui est affecté aux opérations complémentaires.

Les deux Ordres ont été informés par le cabinet du ministre de la Justice que la date du 1er avril 2017 était postposée au 1er septembre 2017, selon eux pour pouvoir poursuivre les négociations avec le ministre de la Justice.

De facto le taux de zéro pour cent actuel reste donc en vigueur.

Un dernier détail : nous constatons que le ministre de la Justice a affirmé deux fois à la Chambre des Représentants, à savoir en Commission de la Justice le 11 janvier 2017 et en séance plénière le 19 janvier 2017 que « l’augmentation du taux de TVA sur les services des avocats dans l’aide juridique de deuxième ligne n’entraînera pas de charge financière supplémentaire pour l’avocat ni pour le justiciable, même pas en ce qui concerne le préfinancement de la TVA due. »

Mais jusqu’à récemment aucune proposition de loi n’a été approuvée par la chambre pour créer un fonds budgétaire pour l’aide juridique de deuxième ligne (initialement prévu uniquement pour les affaires pénales, par la suite généralisé à toutes les affaires en justice), là où les travaux préparatoires mentionnent que « la proposition de loi offre la possibilité de créer des moyens financiers supplémentaires pour financer l’aide juridique de deuxième ligne sans que chaque contribuable doive payer un supplément. Ce ne sont que les utilisateurs de la Justice qui doivent payer un petit supplément. Celui qui n’a pas affaire avec la Justice ne paie par conséquent pas de contribution », selon l’auteur de la proposition de loi.

« Justiciables » et « utilisateurs de la justice » ne sont-ils dont pas synonymes ?

Il s’agit donc d’un énième nouvel « impôt » à l’accès de la justice, de 20 euros (et ce en plus de la majoration du droit de rôle, de la TVA sur les honoraires d’avocats et d’huissiers de justice, etc. ces dernières années).

Jurgen Soetaert

Rédacteur en chef adjoint de Fiscalnet

Avocat au barreau de Louvain

Cabinet d’avocats Advonet

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