Transformer un compte courant débiteur en avance à terme fixe

argent

La problématique n’est pas neuve, surtout dans les PME : pour éviter de prélever une rémunération trop imposée, le dirigeant prélève une partie de ses besoins en compte courant.

Au fil des ans, le solde de ce compte courant gonfle au point d’en devenir inquiétant et représenter une bonne partie des actifs de la société.

Outre le fait qu’il y a un risque de confusion de patrimoine, voire d’abus de biens sociaux, cette situation n’est pas neutre du point de vue fiscal, puisque le compte courant produit un intérêt fictif qui est constitutif d’un avantage de toute nature, lourdement imposé.

En effet, alors qu’on est dans une situation de taux zéro depuis un certain temps, l’avantage de toute nature sur le solde de ce compte courant est de 8,16% pour l’année 2015. Cet ATN est imposable dans le chef du dirigeant.

D’où la tentation, quand le compte courant est trop élevé, de le transformer en avance à terme fixe.

En effet, dans ce cas, le taux d’intérêt pour déterminer l’ATN passe, pour l’année 2015, de 8,16% à … 2,43%.

Ce n’est pas interdit, mais il faut respecter un certain nombre de conditions.

Tout d’abord, il faudra veiller à établir une convention entre la société et son dirigeant, pour fixer le taux et les termes du remboursement de l’avance. On veillera aussi à se prémunir des critiques en matière de conflit d’intérêt. Certes, cet argument est relatif, puisqu’il ne peut être soulevé que par les actionnaires ou associés de la société, mais il est prudent de faire mention de la convention dans le rapport de gestion et de la faire entériner par un point spécial dans le procès-verbal de l’assemblée générale qui statue sur les comptes de l’année où le compte courant a été transformé en avance en terme fixe.

Ensuite, qui dit avance à terme fixe dit obligation de remboursement.

Le remboursement peut se faire par tranches ou en une fois. Quel que soit le choix opéré, il faudra veiller à bien respecter cette condition.

En effet, prévoir des échéances et ne pas les respecter, ou seulement partiellement, fait courir le risque imminent, lors du premier contrôle fiscal, de voir l’administration considérer comme simulée la convention de transformation du compte courant en avance à terme fixe.

La conséquence est que la différence entre le taux d’intérêt prévu dans la convention et le taux de l’ATN pour avance sans terme (8,16% pour l’année 2015) sera imposé dans le chef du dirigeant.

C’est pour avoir omis de respecter ces échéances de remboursement qu’un dirigeant d’une société médicale s’est retrouvé dans cette situation.

En outre, l’écriture comptable opérant le transfert du compte courant (4160) au compte avance à terme (2910 et 4165) n’avait été enregistrée que 6 mois après la signature de la convention.

La Cour d’appel de Mons, dans un arrêt du 20.11.2015, confirme l’opinion du Tribunal de 1ère instance et conforte la décision de l’administration de considérer la convention comme simulée et le taux d’intérêt fictif applicable aux avances sans terme en place du taux pour les avances avec terme.

Nous ferons aussi remarquer qu’il ne sert à rien non plus de faire procéder au remboursement de l’avance à terme fixe par le biais de nouveaux prélèvements en compte courant. Une simple écriture comptable suffit, mais l’administration y verra tout autant une simulation.

En conclusion, si transformer un compte courant en avance à terme fixe est possible, il faut bien en évaluer les conséquences dès le départ et surtout en respecter les conditions.

Les sociétés qui ont profité de l’ « opération art.537 » (distribution des réserves au taux de 10% de précompte mobilier et augmentation de capital pour le produit net) auront pu trouver dans cette aubaine une manière bien plus simple de régler un problème de compte courant exorbitant. En effet, après 4 ans, il pourra être procédé à une réduction de capital dont le produit servira à rembourser le compte courant débiteur du dirigeant associé.

Emile Masset

Rédacteur en chef de Fiscalnet

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